le 6 juin 2013
Les aptitudes en relations humaines, ou le « savoir-être », prennent de plus en plus d’importance pour le personnel de première ligne
Linda Johnson, Canadian Security Magazine
Janvier / Février 2012
Quand on pense aux agents de sécurité traditionnels, l’image qui nous vient à l’esprit est souvent celle d’une personne insondable au visage de marbre et au tempérament bourru – bref, un caractère intimidant.
Néanmoins, cette image s’estompe rapidement à mesure que les compagnies de sécurité comprennent qu’il ne suffit plus de simplement former les agents à menotter les suspects. Les clients exigent plus qu’un certain niveau d’expertise technique ; ils veulent des agents de sécurité avec un sens de l’entregent bien développé qui ont été formés à l’éventail complet de relations interpersonnelles, comprenant notamment les communications et la résolution de conflits. La formation en savoir-être n’est pas non plus uniquement pour les agents de sécurité, les employés des autres secteurs, comme les services informatiques et juridiques, se doivent également de perfectionner leurs aptitudes interpersonnelles.
« Le savoir-être est de plus en plus important, a indiqué Paul Guindon, Chef de direction de Commissionnaires Ottawa. L’agent de sécurité est la première personne que les visiteurs et les employés de nos clients voient à leur arrivée et la dernière personne qu’ils saluent à leur départ. Nous sommes essentiellement l’intermédiaire du client, nous le représentons, et cela nécessite une bonne mesure de savoir-être. »
Au cours des cinq dernières années, Les Commissionnaires a élaboré un nombre de programmes de développement des aptitudes interpersonnelles comprenant des cours comme « Techniques de communication » et « Avantage service » qui font partie de la formation générale des employés ; ces cours commencent à partir de la formation de base d’agent de sécurité et se poursuivent jusqu’à la formation en gestion.
Il s’agit de cours exhaustifs qui couvrent tout. Par exemple, les participants apprennent l’importance de la bonne humeur et de la courtoisie au travail, tout comme ils apprennent comment apaiser les tensions, a expliqué Guindon. La formation est largement axée sur les moyens de calmer les gens et d’offrir l’aide dont ils ont besoin. Prenons par exemple les tribunaux familiaux où les gens sont souvent inquiets et angoissés. Les agents de sécurité sont bien placés pour les aider en prenant le temps d’expliquer les procédures, de leur montrer où s’inscrire, de les renseigner sur les formulaires à compléter, ou de leur indiquer où aller.
« Souvent, le simple fait d’être salué par une personne souriante plutôt que d’être obligé de passer par un grincheux fait toute la différence et nous vaut la confiance du public, a-t-il ajouté. Une fois qu’on commence à les intégrer, on réalise rapidement que ce sont les petits gestes qui nous permettent de surpasser les attentes du client… et du public. »
Travaillant en groupe, les étudiants prennent connaissance de différentes mises en situation et trouvent des moyens de résoudre les différends, a expliqué Guindon. Ils font parfois des jeux de rôles pour simuler un incident. « Suivant un script, un étudiant joue le rôle d’une personne au comportement étrange ou agressif et l’autre joue le rôle de l’agent de sécurité responsable de désamorcer la situation. »
Selon Michael Harvey, directeur de l’éducation du « Centre for Security Training and Management » à Toronto, les compétences spécialisées et les aptitudes interpersonnelles sont d’une importance égale pour le personnel de sécurité. Cette école pour les agents de sécurité et les enquêteurs privés met un accent particulier sur les interventions d’urgence et, selon lui, il est essentiel que les participants apprennent comment interagir avec les gens.
« Nous tentons d’injecter une perspective humaine dans tous nos enseignements et de sensibiliser nos étudiants à l’importance de comprendre les motivations des gens avec qui ils traitent dans leur quotidien, a-t-il ajouté. Je mets l’accent sur l’empathie parce que, de manière générale, les gens ne cherchent pas quelqu’un pour sympathiser avec eux, ils veulent quelqu’un qui est capable de comprendre leur problème et leur offrir l’aide dont ils ont besoin. »
Durant ce cours de cinq semaines, Harvey prête une attention particulière au langage corporel. Les jeux de rôles permettent aux étudiants de constater qu’ils transmettent parfois des informations sans même en avoir conscience. Si une personne garde les yeux braqués sur la porte lorsqu’elle offre d’aider quelqu’un, elle lui dit essentiellement qu’elle veut partir ou qu’elle souhaite que quelqu’un arrive pour prendre la relève et lui éviter d’avoir à résoudre elle-même le problème.
Selon Harvey, la compréhension du langage corporel peut être un facteur déterminant dans l’issue d’une situation. Un agent de sécurité qui roule les yeux, même par inadvertance, lorsque quelqu’un lui explique une situation donne l’impression qu’il croit que la personne ment ou que son problème est sans importance.
« Se rouler les yeux est un geste moqueur et insolent qui témoigne d’un manque d’intérêt. L’agent qui le fait perd immédiatement la coopération de son interlocuteur. C’est un excellent moyen de faire changer d’idée celui qui avait l’intention de nous aider », a-t-il expliqué.
Harvey encourage également ses étudiants à faire attention au ton, au volume, et à la cadence des paroles. Est-il possible de connaître l’humeur d’une personne à partir de son ton de voix ? La personne parle-t-elle rapidement parce qu’elle est inquiète ? Parle-t-elle lentement parce qu’elle tient à se faire comprendre ? Crie-t-elle parce qu’elle est fâchée ou parce qu’elle a une déficience auditive ?
« Nous encourageons les agents à regarder au-delà des paroles afin de noter la façon dont la personne s’exprime et ce qui la motive », a-t-il ajouté.
Le savoir-être était d’ailleurs l’une des principales exigences de la demande de soumissions de services de contrôle lancé l’an passé par l’Administration canadienne de la sà»reté du transport aérien (ACSTA). L’ACSTA est l’organe gouvernemental responsable des opérations de sécurité des aéroports du Canada. L’entregent est l’un des volets principaux de la formation des agents de contrôle de l’agence, a indiqué le porte-parole Mathieu Larocque.
Entre 6 000 et 6 500 agents de contrôle ont suivi le programme national de formation et de certification de l’ACSTA qui débute avec un cours de base de six jours. Ce premier cours aborde des points techniques, ainsi que les moyens de faire preuve d’empathie et de répondre aux besoins des passagers, de gérer les clients difficiles, et de voir aux besoins particuliers de certains passagers. En plus de la formation en ligne et pratique, le programme prévoit des jeux de rôles pour l’acquisition de certains concepts.
« Ces programmes s’articulent principalement autour des aptitudes interpersonnelles et du service à la clientèle », a-t-il précisé.
« Ce sont des aptitudes qui prennent toute leur importance lors des contrôles préembarquement, parce que ce sont des gens que les agents sont appelés à contrôler. C’est pour cette raison qu’il est essentiel d’intégrer le savoir-être et le service à la clientèle à tous nos programmes de formation. »
Les agents de contrôle doivent renouveler leur certification chaque année. Le programme de formation continue de l’ACSTA est conçu pour aider les employés à perfectionner leurs compétences techniques et leur savoir-être dans les domaines du service à la clientèle, des communications, du comportement, etc.
Les rencontres de quart hebdomadaires étant principalement axées sur les relations avec le public contribuent au développement professionnel des agents en leur permettant d’analyser des situations réelles. Ils examinent la résolution d’incidents survenus sur leur site ou à d’autres aéroports et font le lien avec leur propre poste de contrôle.
« Bref, nous parlons de ce qui s’est passé et nous examinons l’intervention de l’agent de contrôle. Il s’agit d’un excellent moyen d’apprendre des nouvelles façons de faire ou de trouver des solutions de rechange aux interventions moins bien réussies », a-t-il expliqué.
« C’est également un bon moyen de nous assurer que le service à la clientèle demeure une priorité pour nos agents de contrôle. »
Les Commissionnaires offre également une formation sur les aptitudes interpersonnelles au personnel non-officier, a ajouté Guindon. Des différends surviennent parfois sur le terrain entre les officiers ou entre les gestionnaires et les officiers.
Par exemple, a-t-il expliqué, il nous est arrivé par le passé de constater que notre personnel n’était pas toujours traité aussi bien que nos clients.
« Nous avons donc décidé d’offrir ces cours à notre équipe interne des services de la paie et des uniformes afin d’améliorer leurs aptitudes pour le service à la clientèle, même si les clients dans ce cas-ci étaient nos propres employés. »
L’ACSTA offre également une formation en savoir-être aux employés de son siège social et de ses bureaux régionaux. Le programme de base est offert à tous les nouveaux employés souhaitant perfectionner leurs compétences pour les relations avec le public, et ce, peu importe qu’ils soient affectés aux finances, aux ressources humaines, aux opérations, à la formation (personnel responsable de l’élaboration du matériel de cours et instructeurs), aux services juridiques, à l’administration, ou à l’informatique.
« Les candidats pour les postes impliquant une plus grande présence auprès du public doivent démontrer qu’ils possèdent l’expérience et les aptitudes nécessaires pour ce genre de travail, a indiqué Larocque. Le cours n’est pas obligatoire, mais il leur est disponible et les gestionnaires le recommandent fortement. »
Les agents de sécurité d’aujourd’hui sont appelés à gérer une panoplie très variée de situations et de gens, a précisé Harvey. Ils doivent être en mesure de décoder les réactions et les motivations afin de bien gérer et contrôler les situations.
« Dans le cadre de leur formation, nous essayons de leur inculquer l’importance de comprendre la cause d’un problème avant de tenter de le régler. Il est impossible de résoudre un problème qu’on ne comprend pas. Aujourd’hui, notre rôle exige bien plus que la capacité de calmer les gens. »
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